chercheur, anthropologue, pédagogue

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Colloque en hommage à l’un des maîtres de Jousse

Marcel Jousse dédicaçait ainsi son ouvrage publié en 1925, Le Style oral rythmique et mnémotechnique chez les Verbo-moteurs :

À LA MÉMOIRE DE MON MAÎTRE DE PHONÉTIQUE EXPÉRIMENTALE AU COLLÈGE DE FRANCE M. L’ABBÉ JEAN-PIERRE ROUSSELOT CETTE ESQUISSE D’UN TRAVAIL QU’IL ENCOURAGEA EST PIEUSEMENT DÉDIÉE

Nous avons le plaisir de vous annoncer le Colloque anniversaire en hommage à l’abbé Rousselot : de la création au rayonnement de la phonétique expérimentale.

Informations pratiques

Il aura lieu les lundi 28 et mardi 29 octobre 2024 à la salle des Actes de l’Institut Catholique de Paris (74 rue de Vaugirard, 75006 Paris), lieu où la phonétique expérimentale a été enseignée pour la première fois.

Le colloque est gratuit mais l’inscription est obligatoire à partir de ce lien, ou en écrivant à Rémy Guérinel.

L’inscription par le lien nécessite la création d’un compte sur sciencesconf si vous n’en avez pas déjà un.

Il est demandé aux personnes inscrites de s’engager à venir afin de permettre de gérer l’événement dans les meilleures conditions possibles.

La date limite d’inscription est fixée au 20 octobre 2024.

Vous trouverez le programme ci-dessous et en ligne via ce lien. Les interventions seront filmées.

Une semaine avant paraîtra un dossier consacré à l’abbé Rousselot, inventeur de la phonétique expérimentale, dans la revue de l’Institut catholique Transversalités.

Le programme

28 octobre 2024

Matin

9h : Ouverture puis lecture partielle de la leçon inaugurale de l’abbé Rousselot au Collège de France en 1923 par Gérard Rouzier

10h : Remy Guérinel (ICP) – L’abbé Rousselot vu de l’Institut Catholique de Paris

10h45-11h15 : pause

11h15 : Didier Demolin (LPP, Sorbonne Nouvelle) – Rousselot et l’étude des langues du monde

12h-12h45 : Jean-Léo Léonard (Dipralang, Montpellier 3) – L’enquête sociophonétique de l’abbé Rousselot à Cellefrouin : un terrain pionnier en dialectologie sociale

Après-midi

14h15 : Enrica Galazzi (Università Cattolica Milano) – P.J. Rousselot, un bâtisseur : les appareils, les laboratoires, les revues

15h :  Giusy Pisano (ENS Louis Lumière) – Autour de l’abbé Rousselot et la rééducation de la parole chez les sourds et malentendants

15h45-16h15 : pause 

16h15 : Valérie Spaeth (Sorbonne Nouvelle) – La phonétique pour l’enseignement du français aux étrangers avec l’abbé Rousselot : que faire des différences ?

17h : Pavel Stürm (Charles Université, Prague) – From Paris to Prague: Joseph Chlumský’s enduring commitment to Rousselot’s experimental phonetics

17h45 : Pierre-Yves Testenoire (Sorbonne Nouvelle) – Par les portes entr’ouvertes du laboratoire poétique : les recherches d’André Spire (fin 18h30)

18h30 : Cocktail et exposition “Les instruments de la parole” (Université Montpellier 3, Paul Valéry)

29 octobre 2024

Matin

9h30 : Jacques Baudet (historien, ancien président de la Société Archéologique et Historique de la Charente) – Du cartulaire de l’abbaye de Cellefrouin en Charente aux études linguistiques de l’abbé Rousselot.

10h15 : Florence Louvet (ICP) – Marcel Jousse, élève de l’abbé Rousselot

11h-11h30 : pause 

11h30-11h50  : Chris Mustazza (Université de Pennsylvanie, USA) – Abbé Rousselot and the Birth of the Poetry Sound Archive

11h50-12h10 : Nicolas Quint (LLACAN, Villejuif) et Maximilien Guérin (STL Lille) – Dans le Croissant charentais, sur les traces de l’abbé Rousselot

12h10-12h30 : Didier Demolin et Angélique Amelot (LPP, Sorbonne Nouvelle) – Les modifications du langage dans le parler de Cellefrouin du 19è au 21è siècle

12h30-12h50 : Angélique Amelot, Stéphane Hans, Lise Crevier Buchman et Didier Demolin (LPP, Sorbonne Nouvelle & Service ORL de l’Hôpital Foch) – Rousselot et la phonétique clinique

Après-midi : Les laboratoires de phonétique en France

14h30-15h : Coriandre Villain et Nathalie Vallée (GIPSA Lab, Grenoble Alpes) – L’héritage de Rousselot à Grenoble : création et développement d’un des tout premiers instituts de phonétique

15h-15h30 : Fabrice Hirsch (PRAXILING UMR 5267, Montpellier 3) et Christelle Dodane  (CLESTHIA, Sorbonne Nouvelle) – Le laboratoire de phonétique de Montpellier comme héritage de l’abbé Rousselot

15h30-16h : Yohann Meynadier, Alain Ghio (Laboratoire de Phonétique Parole et Langage, Aix-en-Provence) & Didier Demolin – Dans les pas de l’abbé : la saga instrumentale d’Aix

16h-16h30 : pause

16h30-17h : Rudolph Sock (LiLPA, Strasbourg) – Les débuts de la phonétique expérimentale à l’Institut de Phonétique de Strasbourg : de l’Abbé Rousselot à Georges Straka

17h-17h30 : Cécile Fougeron, Angelique Amelot et Annie Rialland (LPP UMR 7018 – Université Sorbonne Nouvelle) – Sur l’histoire de l’institut de phonétique de Paris de 1911 à 1950

17h30 : Clôture

Le geste à l’ère numérique

Que de changements dans notre univers technique et médiatique depuis les derniers cours de Jousse dans les années 1950 ! Chaque génération d’enfants a grandi dans un monde différent de celui de ses parents, et ce n’est pas terminé ! L’anthropologie du geste et du rythme de Jousse – aussi appelée anthropologie du mimisme – est donc appelée à se renouveler dans l’observation et la prise de conscience des transformations induites par notre entrée dans l’ère numérique.

L’Association Marcel Jousse a souhaité mettre en avant ce thème lors d’un séminaire public qui a eu lieu samedi 18 novembre 2023 à Paris et en visioconférence.

Nous partageons ici les vidéos des présentations réalisées à cette occasion. Nous pourrons aussi compléter cette page au fil du temps avec d’autres contributions et ressources.

Voici quelques questions en toile de fond de notre réflexion.

  • Comment la méthode et la terminologie joussiennes peuvent-elle nous être utiles pour mieux comprendre nos usages des médias, des techniques et des technologies, ainsi que les effets qu’ils ont sur nous, tant qu’individuellement que culturellement ?
  • En quoi ces évolutions sociales, mais aussi scientifiques et techniques, nécessitent-elles de reprendre la pensée de Jousse en la complétant ou la rectifiant – comme il y invitait lui-même ses auditeurs ? « Retournez au réel, mes paroles ne sont que des panneaux indicateurs… »
  • Le modèle de l’anthropologie joussienne – le mimisme – replace au centre de la science, de la société et de la culture, l’Homme vivant et mouvant en son expression multimodale. Cette pensée actualisée peut-elle servir de base à une critique de certaines de ces évolutions technologiques et des idéologies qui les accompagnent ? Peut-elle proposer une alternative pratique ?

Titus Jacquignon : une introduction

Thomas Marshall

“Sentir et voir le numérique en dessous des mots”

Thème annoncé dans le programme du séminaire

Cette présentation propose un essai d’utilisation de la méthode de l’anthropologie du geste pour décrire ce que sont les technologies numériques, en dessous des mots conventionnels utilisés pour les nommer : quels sont leurs gestes caractéristiques et leurs gestes transitoires ? De quoi sont-elles des gestes analogiques ? Quelles histoires nous racontent le vocabulaire du numérique ? L’industrie numérique met-elle en place une stratégie de colonisation culturelle ? Je partirai de mon expérience pour prendre conscience de ce que le mimisme humain fait du numérique, et ce que le numérique fait du mimisme humain. Il sera question de simulation, de simulateurs et de simulacres.

Le texte de la présentation avec des compléments

Rémy Guérinel

“Une prise en main artisanale des outils numériques – de la machine à écrire augmentée à la bureautique digitale”

Thème annoncé dans le programme du séminaire

Mon expérience professionnelle a constitué principalement à accompagner des collaborateurs en entreprise face au changement technologique. Le déploiement des nouvelles applications, qualifiées successivement de micro-informatiques, de bureautiques, de numériques et de digitales, a été progressif, ininterrompu et constamment accéléré. Ma recherche sur l’approche anthropologique singulière de Marcel Jousse s’est faite en parallèle.
Mon milieu professionnel a été pour moi un “laboratoire de prise de conscience”. Mon approche singulière actuelle sur ces sujets se résume en un fait simple : ces éléments “virtuels” nouveaux peuvent être considérés comme des outils à prendre en main comme un artisan traditionnel prend en main un outil face à un matériau brut. Cette analogie se révèle être le fil conducteur de ma pratique.
En cela, rien de neuf, “l’homme est un complexus de gestes”. Face à la nouveauté, il s’agit plus ou moins de monter des gestes nouveaux, dans le changement, de les démonter et de les remonter. Par contre, ces nouveaux outils et matériaux, moins visibles, sont plus complexes à saisir et à empoigner.

Muriel Roland

“De l’homme sans geste au monde sans homme ? Technique versus technologie”

Thème annoncé dans le programme du séminaire

L’inachèvement natif de l’Anthropos, en le privant de comportement d’espèce (instinct naturel), l’oblige à apprendre par le geste mimique, un comportement culturel constitué de « techniques du corps » (Marcel Mauss), les unes universellement humaines (verticalisation, bipédie, langage), les autres propres à sa communauté (langue, savoir-faire quotidien et artisanal, tradition).
Si c’est bien « la Technicité qui fait l’homme » (André Leroi-Gourhan), que nous nous auto-produisons nous-mêmes par le geste interactionnel, quelles sont les conséquences du surdéveloppement des technologies exosomatiques, rendu possible par le numérique, qui font de nous les exécutants d’un monde préfabriqué dans lequel nous nous trouvons sommés de vivre dans une réalité que nous ne pouvons plus co-œuvrer, ni somatiser par le geste ? N’est-ce pas là la promesse d’une réduction drastique des savoir-faire, savoir-être, savoir-sentir et savoir-penser humains que cette même technologie se propose alors « d’augmenter » par ses propres avatars (algorithmes, IA, smart cities, QR codes, nano-puces sous-cutanées, implants cérébraux, robotisation, etc.) ? Si, comme le dit Marcel Jousse, « le geste, c’est l’homme », que peut-il advenir de lui s’il est privé du geste ?

Gabriel Bourdin

“Pensée gestuelle et algèbre numérique”

Thème annoncé dans le programme du séminaire

Jousse a conçu le déroulement de la pensée humaine comme une séquence de styles expressifs. Cette séquence n’est pas linéaire. Les styles expressifs concourent, se chevauchent et fusionnent en unités mimodramatiques multimodales. L’anthropologie du geste reconnaît l’interaction de ces styles dans l’humanité d’aujourd’hui, même si les ressources gestuelles de l’expression et de la pensée sont souvent atrophiées par la pédagogie moderne de tradition livresque. En effet, et malgré l’algébrose de la pensée moderne et écrite qui prévaut dans la société occidentale ou occidentalisée, l’individu moyen reste une manifestation plus ou moins congruente de tous ces modes d’expression combinés. Sauf handicap éventuel ou carence psychosociale et éducative, nous pouvons encore tous chanter, danser et inventer de petites histoires comiques lors d’une fête. Cependant, le spectre de la déshumanisation par ce que l’on peut appeler une civilisation technologique basée sur des circuits logiques-numériques nous guette. L’anthropologie du geste peut-elle nous apporter de la lucidité face aux promesses de l’idéologie transhumaniste et de ses applications technologiques ?

Résumé de la présentation en français, espagnol et anglais

Le texte préparé pour cette communication (Ajout le 18/09/2024)

Présentation sur Jousse au Comité International de la Danse – 2/12/2023

Le Conseil International de la Danse est une ONG internationale sans but lucratif, qui est partenaire de l’UNESCO depuis sa fondation en 1973. Elle fédère plusieurs milliers de membres (personnes et organisations) dans 170 pays. Ils ont lancé le programme « Danse et Spiritualité » qui traite du rapport de la danse et des artistes avec le spirituel.

Suite à la suggestion de France Schott Billmann, l’Association Marcel Jousse a été contactée par le responsable de ce programme, Constantin Kontogiannis. Les premiers échanges ont abouti à la programmation d’une conférence de Titus Jacquignon. Une belle occasion de faire découvrir les recherches anthropologiques de Jousse dans ce milieu qui se préoccupe des danses en tant que patrimoine culturel vivant à reconnaître et à préserver.

Marcel Jousse : Anthropologie de l’Expression

Présentation par Titus Jacquignon, Docteur en sciences du langage

Samedi 2 décembre à 16h00 (heure de Paris)

Programme prévisionnel

Langage : en français, avec traduction en anglais

Lien zoom : https://us02web.zoom.us/j/9414526266

Pour vous inscrire, écrire à DanceAndSpirituality@gmail.com

Pour en savoir plus :

  • Le document de présentation du programme Danse et Spiritualité

Présentations des recherches de Muriel Roland (2023)

Nous avons le plaisir d’annoncer la prochaine soutenance de la thèse de Muriel Roland, membre active de l’Association Marcel Jousse, ainsi que deux occasions de l’entendre présenter les fruits de son travail, en novembre et décembre.

Qui est Muriel Roland ?

Muriel Roland, artiste de théâtre, formée à l’École Internationale de Mimodrame Marcel Marceau de Paris (1983-86), co-fondatrice de la Cie SourouS, du Festival Auteurs en Acte, de l’Escuela nacional de teatro – Santa Cruz-Bolivie, vient d’achever une thèse de doctorat sur le geste de l’acteur, sous la direction du Pr. Katia Légeret, (Université Paris 8). Depuis 30 ans, l’œuvre de Marcel Jousse est pour elle une source vive et intarissable d’inspiration.

Lors des années passées, elle a proposé plusieurs interventions dans le cadre de l’Association Marcel Jousse, notamment lors des séminaires dont les vidéos sont publiées sur notre chaîne You Tube. Elle s’intéresse aussi beaucoup à la pensée de René Girard, qu’elle met en lien avec celle de Jousse, notamment pour mieux comprendre la violence.

Sa thèse de doctorat

Faisant retour sur une riche carrière artistique et pédagogique, Muriel Roland a réussi à aboutir son projet de recherche et d’écriture, dans le cadre exigeant d’une thèse de doctorat – tout en continuant en parallèle ses activité théâtrales ! Nous lui adressons toutes nos félicitations pour cet aboutissement et sommes impatients de pouvoir lire son travail. Le résumé ci-dessous, qu’elle a rédigé, montre bien l’ambition et la richesse intellectuelle d’un travail, qui est à la fois profondément incarné dans ses expériences.

Le rituel universitaire de la soutenance de sa thèse sera l’occasion de la réception de ce travail dans le cadre de la communauté scientifique interdisciplinaire des études théâtrales. Cet événement aura lieu lundi 20 novembre à l’Université Paris 8 à Saint Denis. Il n’est malheureusement pas ouvert au public du fait de la petite taille de la salle disponible.

Poïétique du geste de l’acteur au théâtre – Thèse sous la direction de Madame Katia Légeret. Laboratoire de rattachement : Scènes du monde, création, savoirs critiques – UFR : Arts, philosophie, esthétique

Membres du jury :

  • Nathalie Coutelet, professeure, Université Paris 8.
  • Katia Légeret, professeure, Université Paris 8.
  • Doina Petrescu, professeure, Université de Sheffield
  • Jean-Pierre Triffaux, professeur, Université Côte d’Azur

 

Résumé :

La présente thèse trouve son origine dans la pratique du théâtre et du métier d’actrice de son autrice ; elle vise à penser la nature du geste, et plus particulièrement celle du geste théâtral dans une perspective cosmologique, anthropologique et historique.

En prenant appui sur l’anthropologie du geste de Marcel Jousse, la philosophie taoïste, la logique antagoniste de Stéphane Lupasco et ses développements par Basarab Nicolescu, elle envisage le corps humain comme « le microcosme qui réverbère le macrocosme », c’est-à-dire comme étant régi par les lois même de l’univers et de la nature, ce qui fait l’objet de la première partie.

En s’arrêtant sur les conséquences de la verticalisation de l’humain et de son inachèvement à la naissance (néoténie), la seconde partie pointe les particularités d’un comportement d’espèce qui conduit l’humain à intégrer ses traits invariants (verticalisation, bipédie, langage) et particuliers (cultures) par le biais d’un processus d’apprentissage qui le singularise et le caractérise : le geste mimique.

La troisième partie examine – à partir du théâtre grec antique et à l’aune notamment de la pensée de René Girard – comment le théâtre, en représentant à la fois le peuple (à travers le chœur) et l’ancien sacrifié (à travers l’acteur) opère le prolongement de la scène rituelle ainsi que sa mise à distance pour le spectateur (ancien lyncheur). Cette évolution informe en profondeur les « techniques du corps » (Marcel Mauss) de l’acteur, qui retourne optiquement l’ancienne aire sacrée pour la transformer en scène d’incarnation agonistique (agôn, « lutte, combat »). Simultanément, en frère du poète-dramaturge et du didascalos-metteur en scène, l’acteur est aussi porteur du récit et compositeur méticuleux de la conduite de sa partition gestuelle dans l’espace et la durée. Il lui faut alors combiner transe et maîtrise. L’inscription corporelle de ce paradoxe est évoquée à travers les techniques de l’acteur marionnettique et des « trois corps en un » de la tradition chinoise (Shēn Tĭ- marionnette-corps physique ; Shēn Yì- marionnettiste- corps d’intention ; Shēn Qì- fil- corps énergétique) que l’on retrouve chez Marcel Marceau, Antonin Artaud, comme dans le Nāṭya-śāstra (traité antique de l’hindouisme donnant les bases et principes du théâtre indien).

L’ensemble de cette thèse vise à interroger les conditions par lesquelles le geste de l’acteur et l’art du théâtre tout entier pourraient contribuer à une ré-instauration de la poïèsis (art ou acte de fabriquer) dans nos vies marquées par la disparition accélérée – au profit des seules technologies exosomatiques – des techniques gestuelles, corporelles et relationnelles constitutives de notre humanité.

 

Présentations publiques

Vous aurez l’opportunité d’entendre et de voir Muriel Roland partager les fruits de son travail à deux occasions.

  • Samedi 18 novembre (16 h 15-17h) : “De l’homme sans geste au monde sans homme ? Technique versus technologie”

A Paris ou en visioconférence, Muriel Roland présentera cette facette de sa thèse qui questionne les impacts des nouvelles technologies, dans le cadre du séminaire organisé par l’Association Marcel Jousse : “Le geste à l’ère du numérique” (14h-18h).
Pour en savoir plus

  • Mardi 5 décembre (13 h 30-14h45) : “Les trois corps de l’acteur, enraciné-suspendu, entre transe et maîtrise”

Cette conférence gestuée aura lieu au Théâtre L’Echangeur à Bagnolet, dans le cadre des Rencontres publiques autour du Vaudou haïtien, des pratiques rituelles et des arts de la transformation. Elle abordera de nombreuses thématiques de ses recherches. Elle sera suivie d’une courte pratique (pour les volontaires) et d’une discussion.

Si le trac est le souvenir corporel d’une ancienne traque ; si tragédie, « chant du bouc » (émissaire) signifie d’abord le chant rituel accompagnant le sacrifice du bouc aux fêtes de Dionysos à l’époque archaïque ; « si le théâtre est fait pour permettre à nos refoulements de prendre vie » (Antonin Artaud), nous pouvons considérer l’acteur comme le fantôme de la victime sacrificielle, relevé de son cadavre, revenant jouer « comme un supplicié que l’on brûle et qui fait des signes sur son bûcher » (Antonin Artaud). Ceci éclaire la fabrique de nombreuses « techniques du corps » de l’acteur qui retourne optiquement l’ancienne aire rituelle pour la transformer en scène d’incarnation agonistique (agôn, « lutte, combat »). Simultanément, en frère du poète-dramaturge et du didascalos-metteur en scène, l’acteur est aussi porteur du récit et compositeur méticuleux de la conduite de sa partition gestuelle dans l’espace et la durée. Il lui faut alors combiner transe et maîtrise. C’est l’inscription corporelle de ce paradoxe qui sera ici explorée, à travers l’évocation gestuelle de l’anthropologie du geste de Marcel Jousse, de l’acteur marionnettique et des « trois corps en un » de la tradition chinoise (Shēn Tĭ- marionnette-corps physique ; Shēn Yì- marionnettiste- corps d’intention; Shēn Qì- fil- corps énergétique) que l’on retrouve chez Marcel Marceau, Antonin Artaud, dans le Nāṭya-śāstra (traité antique de l’hindouisme donnant les bases du théâtre indien) ainsi que dans le texte de Heinrich von Kleist Sur le théâtre de marionnettes.

Cette présentation s’inscrit dans le cadre des rencontres publiques autour du vodou haïtien, des pratiques rituelles et des arts de la transformation : Interventions scientifiques, artistiques et projections de films anthropologiques avec des enseignants chercheurs d’universités françaises et haïtiennes – LUNDI 4 & MARDI 5 DÉCEMBRE 2023 | 13h30 > 19h00

Réservation gratuite en ligne pour les rencontres

Autres activités autour des arts vivants du vodou haïtien

Muriel Roland collabore depuis quelques années avec des chercheurs explorant les arts de la transformation, sur et en dehors de la scène théâtrale. Nous relayons donc à sa demande l’annonce des autres activités prévues sur ce thème au théâtre de Bagnolet.

Programme général

Pour réserver gratuitement (et rapidement), cliquez sur les liens ci-dessous :

  • SAMEDI 2 & DIMANCHE 3 DÉCEMBRE 2023 | 10h00 > 13h00
    Ateliers pratiques de chants et danses vodou haïtien
    Dirigés par Mambo Ninie et 4 artistes haïtiens des communautés du vodou Madame Nerval et Legphibao

Réservation gratuite en ligne pour les ateliers

  • MARDI 5 DÉCEMBRE 2023 | 19h30
    Performance sur la piété et l’échange entre les hommes et les dieux
    De Stéphane Poliakov & Hugues Badet

Réservation gratuite en ligne pour cette performance

  • MERCREDI 6 DÉCEMBRE 2023 | 19h30
    Performance. Action rituelle
    Laboratoire international des arts de la transformation ; rituels du vodou haïtien et tragédies grecques et classiques françaises
    Avec Marie-Suze Jean-Baptiste, Dalia Jean, Mirlande Merville, Nadilie Charles, Saintelus Candy, Luis Strong Megie, Sarah Periquet. Direction Fabrice Nicot.

Réservation gratuite en ligne pour cette performance

  • JEUDI 7 DÉCEMBRE 2023 | 19h30
    Franchir la barrière
    Performance. Action rituelle
    Avec Marie-Suze Jean-Baptiste, Dalia Jean, Mirlande Merville, Nadilie Charles, Saintelus Candy, Luis Strong Megie. Direction Fabrice Nicot.

Réservation gratuite en ligne pour cette performance

  • 9-13 JANVIER 2024
    Les Bonnes – Matériau
    Performance. Spectacle
    Institut Grotowski de Wroclaw et Atelier Wachowicz/Fret
    Avec Marie Suze Jean Baptiste, Katya Egorova, Elisa Guarraggi, Aleksandra Kugacz-Semerci, Monika Wachowicz, Marie Walker, Gey Pin Ang.

Présentation et réservation

“Marcel Jousse, lecteur de Bergson” est publié

Nous sommes heureux d’annoncer la publication aux éditions du Cerf de cet ouvrage d’Elisabeth (Clara) Vasseur. Il est dérivé de la thèse de doctorat en philosophie qu’elle a soutenu en décembre 2019 à l’Institut Catholique de Paris sous le titre “Marcel Jousse, philosophe, Dialogue avec Bergson.”

Voici la présentation donnée sur le site de l’éditeur :

« Jousse – il a trouvé un filon, comme on dit », confie Bergson dans un entretien avec Lydie Adolphe.
La relation que Marcel Jousse, chercheur, professeur, homme d’Église, entretient tout au long de ses quelque quarante ans d’enseignement avec le philosophe Henri Bergson est pour le moins paradoxale. Entre admiration et rejet, Jousse revendique « sa » lecture de Bergson. Libre et inspirante, souvent critique, voire frôlant la caricature, cette lecture tonique agit en retour sur le lecteur, qu’il soit connaisseur de l’œuvre de Bergson ou pas. Selon Jousse, le geste corporel-manuel, le geste global, est au cœur de la pensée du philosophe. Bergson joue sa pensée avec ses mains, avec tout son corps avant de la jeter dans ses livres. La connaissance des lois anthropologiques du Style oral formulées par Jousse permet de mieux saisir la particularité du style de Bergson, proche de celui de Péguy, et qui s’apparente au style oral des rythmo-mimeurs. Jousse, Bergson : deux noms qui ont marqué leur époque. Le lien fort qui unit les deux penseurs est au cœur de cette enquête – que l’on pourrait aussi écrire « en quête » – à la fois philosophique et historique. Ce livre s’inscrit dans la longue liste des « lecteurs de Bergson » qu’ils soient ou non bergsoniens.

Élisabeth Vasseur, docteur en philosophie, vit en Allemagne. Elle a contribué à faire connaître l’œuvre de Marcel Jousse par ses travaux, en particulier outre-Rhin.

Cette publication est l’aboutissement d’un long travail de l’autrice, qui a démarré en 2016 par la mise en place d’une co-tutelle pour sa thèse entre l’Institut Catholique de Paris et l’université catholique de Eichstätt-Ingolstadt en Allemagne. Son travail de recherche a été suivi par les professeurs Emmanuel Falque et Walter Schweidler. Il a permis également le développement d’un lien entre l’Association Marcel Jousse et l’Institut Catholique de Paris, aboutissant à la réception des archives Jousse par cette institution, et à la publication à cette occasion d’un volume de la revue Transversalités entièrement consacré à Marcel Jousse.

Son travail a bénéficié d’un soutien financier de l’Association Marcel Jousse. Il nous a semblé en effet important, par cette recherche, de continuer à retisser des liens entre Marcel Jousse, perçu comme un chercheur jésuite inclassable, et l’histoire intellectuelle du 20ème siècle. Si, un siècle plus tard, son œuvre semble plutôt être le fruit d’une trajectoire isolée, il est important de souligner que Jousse a entretenu de son vivant de nombreux dialogues, de façon directe ou indirecte, avec de grands penseurs et chercheurs français de son époque.

Rémy Guérinel par exemple avait montré l’importance de ses liens avec ses maîtres du Collège de France, le psychologue Pierre Janet et l’Abbé Rousselot, fondateur de la phonétique expérimentale, deux figures importantes mais néanmoins un peu oubliées.
Clara-Élisabeth Vasseur a eu le courage de s’attaquer au dossier philosophique et historique des liens entre Jousse et Bergson, le philosophe français le plus renommé lorsque Jousse commence à enseigner en 1931. Comme elle l’avait expliqué en 2020 lors d’une présentation (disponible en vidéo pour les membres de l’association), elle n’a pas fait “la thèse sur Jousse et Bergson” mais “une thèse” sur le sujet, en espérant susciter un intérêt et être suivie par d’autres. Ayant disposé de seulement 3 ans pour aboutir son projet, elle a donc dû choisir certaines pistes et en écarter d’autres.

Son travail ne manque pourtant pas d’ambition : l’autrice s’appuie sur une bonne connaissance à la fois de l’œuvre de Bergson et de celle de Jousse ; mais elle ne s’est pas arrêtée à une exégèse comparative des écrits de ces deux penseurs. Dans une démarche d’enquête, elle a aussi cherché à croiser et mettre en lien ce que dit Jousse au sujet de Bergson dans ses cours, ce que dit de Jousse la collaboratrice de Bergson, Lydie Adolphe, et des traces de cette relation intellectuelle conservées dans les archives de l’un et de l’autre, publiées avec d’autres inédits en annexe du livre. Le lecteur y trouvera de nombreux extraits de cours relatifs à Bergson, cours donnés en Sorbonne par Marcel Jousse. Un de ces cours est entièrement consacré à l’intuition bergsonienne.

Espérons qu’à travers ce livre, un dialogue puisse se poursuivre entre les personnes intéressées par l’œuvre de l’anthropologue du geste et celles intéressées par l’œuvre du philosophe !

Thomas Marshall

Membre du Bureau de l’Association Marcel Jousse

Les recherches sur la poésie orale autour d’Antoine Meillet : Jean Paulhan, Marcel Jousse, Milman Parry

Pierre-Yves Testenoire, Maître de Conférences en Sciences du langage à la Sorbonne, vient de publier sous ce titre un article dans la revue Histoire Épistémologie Langage. Il a également écrit l’article de présentation de ce dossier thématique “Linguistique et anthropologie au début du 20e siècle”. Le dossier est composé de 4 articles étudiant les liens entre ces disciplines, alors récentes, à travers les positions de chercheurs répartis dans les communautés scientifiques suivantes : nord-américaine, allemande, française et britannique.

Voici le résumé de l’article publié par son auteur :

“Cet article porte sur trois recherches autour de la poésie orale menées dans le premier tiers du xxe siècle : le travail de Jean Paulhan (1884-1968) sur la poésie populaire traditionnelle à Madagascar, l’anthropologie linguistique de Marcel Jousse (1886-1961) et les recherches de Milman Parry (1902-1935) sur la composition formulaire des poèmes homériques. Ces trois recherches ont en commun d’avoir été dirigées ou en partie inspirées par Antoine Meillet (1866-1936). Elles sont une des manifestations concrètes de l’ambition portée par Meillet de faire dialoguer la linguistique avec l’ethnographie. L’article présente la spécificité de ces trois recherches mais aussi ce qui les réunit dans un objectif commun de décrire ou de théoriser l’oralité poétique. On s’intéresse, en particulier, à l’apport de l’enseignement de Meillet dans ces trois entreprises ainsi qu’à l’accueil qu’il leur réserve dans ses comptes rendus pour les Bulletins de la Société de linguistique de Paris. L’objectif est aussi d’évaluer la contribution de Meillet à l’émergence du concept de « formule » qui prend corps à travers ces travaux et qui deviendra la pierre angulaire des théories oralistes.”

Lire l’article

Voir le sommaire de la revue

 

Il est intéressant que Pierre-Yves Testenoire reprenne des extraits de cours de Jousse dans lesquels ce dernier parle d’échanges qu’il a eu avec Meillet. Notons que Jousse ne présente pas ce dernier comme l’un de ses maîtres, au même titre que Pierre Janet en psychologie, Marcel Mauss en ethnologie et l’abbé Rousselot en phonétique expérimentale – chercheurs dont il a suivi les enseignements à Paris suite à son retour des États-Unis en 1919. En revanche, Jousse s’appuie sur l’autorité scientifique de ce linguiste reconnu, de 20 ans son aîné, afin de montrer à son auditoire que ses travaux sont pris au sérieux – Meillet ayant notamment publié un compte-rendu du Style oral (1925). Hier comme aujourd’hui, un chercheur n’est rien sans la reconnaissance que d’autres chercheurs lui accordent. Et cela d’autant plus pour Jousse, qui est un “franc-tireur” en sciences humaines, sans poste universitaire, proposant rien de moins que la création d’une nouvelle science !
A ce titre, il est précieux que les travaux de Pierre-Yves Testenoire contribuent aujourd’hui à réintégrer, dans une histoire de la linguistique marquée par l’héritage de Saussure, ce courant d’études de l’oralité du début du 20° siècle dont fait partie Marcel Jousse.
Vous pouvez également lire le rendu compte d’un autre texte intéressant de Pierre-Yves Testenoire intitulé : Une sémiologie sans signe : Marcel Jousse et la linguistique de son temps

Thomas Marshall et Titus Jacquignon,
membres du Bureau de l’Association Marcel Jousse

De l’actualité du paysanisme

Marcel Jousse (1886-1961) fonde une méthode anthropologique originale au début des années 30 : l’anthropologie du geste et du rythme, qu’il enseigne en Sorbonne et dans d’autres établissements parisiens jusqu’en 1957. Le paysanisme figure parmi les éléments constitutifs de sa méthode. Le terme peut paraître étrange. Le professeur Jousse s’en explique : « Nous avons donné au mot “paysan” un sens universel. (…) Être paysan, c’est être in-formé par son pays. » (cours du 28/01/1955)

L’Association Marcel Jousse a souhaité mettre en avant ce thème lors d’un séminaire public qui a eu lieu le 19 novembre 2023 dans les locaux de l’Institut Catholique de Paris. Edgard Sienaert (Afrique du Sud) a organisé ce séminaire. Le grand intérêt suscité par ces communications auprès de l’auditoire nous incite à les publier ici, en vidéo et/ou en textes. Nous pourrons également enrichir ultérieurement cette page d’autres apports.

Paysanisme

Nous vous invitons à découvrir un aspect de l’anthropologie joussienne qui se révèle être particulièrement en prise avec notre actualité écologique : une anthropologie de l’habitant et de l’habitat, du pays et du paysage, en interaction – l’habitant habite et modèle son paysage, le paysage habite et modèle les habitants. Marcel Jousse a élargi et approfondi ce thème du pays et du paysan en le situant à la racine d’une anthropologie de la connaissance et de l’expression et aux fondements de la culture ; le thème du paysanisme représente aussi une entrée pour comprendre le style d’enseignement du professeur Jousse et introduit à sa méthode anthropologique.

Le point de départ proposé pour cette exploration est un extrait du cours de Jousse à l’École d’Anthropologie, le 23 janvier 1950 :

Si nous adhérons au pays, c’est que nous adhérons au Paysage …
Toute cette clarté, tous ces élancements de peupliers, toutes ces haies si bien divisantes, toutes ces routes si bien conduisantes, comme tout cela nous a formés !
Taine disait qu’il fallait rechercher la terre dans la formation des esprits. Je le crois bien ! Que serions-nous donc si les gestes de la terre ne nous avaient pas modelés !
Si vous voulez comprendre le Joussisme, qui est le Mimisme à sa proie attachée, allez sur le petit pont de Beaumont et regardez la Sarthe avec ses peupliers reflétants et reflétés, en écho chosal.
Allez à St Christophe-du-Jambet, où ma mère a été élevée, et vous saurez ce que c’est qu’une Université paysanne, maîtresse d’elle-même parce que coordonnée.
Le Paysanisme, adhérent au Pays, adhérent au Paysage, adhérent aux Paysans.

 

Titus Jacquignon

« Paysan et fier de l’être : une “pride“ rurale et conservatrice ou un geste méthodologique et un style d’enseignement ? »

 

Gabriel Bourdin

Vidéo : « Les cabañuelas : la prévision du temps et ses proverbes »

 

Article : « Les cabañuelas : la prévision du temps et ses proverbes »

 

Muriel Roland

« Le paysanisme ou la co-création du monde par un anthropos oeuvrier »

 

Ressources

Le sens concret de “pays”  (citations tirée d’un cours de Jousse).

L’anthropologie du geste et les proverbes de la terre par Adolphe Thomas, Revue Anthropologique (1941).

Songlines : une exposition au musée du Quai Branly à Paris, issue des communautés aborigènes d’Australie contemporaines (4 avril – 2 juillet 2023) :
Les peintures y sont porteuses des connaissances concrètes et analogiques des Aborigènes sur leurs territoires ancestraux, leurs “pays”.
Margo Neale, commissaire générale de l’exposition, explique dans une interview (page 4) :

Dans la vision aborigène du monde, le territoire n’a pas le même sens que pour le monde occidental, où il renvoie simplement à une géographie ou à une surface physique. Pour les populations aborigènes, le Pays est un concept multidimensionnel qui inclut tout. Il n’y a pas de distinction entre les mondes animé et inanimé. Tout est vivant, tout a sa place : les gens, les animaux, les plantes, la terre, l’eau et l’air. Le Pays a été créé par des êtres ancestraux qui s’incarnent dans les particularités d’un paysage.

Le sens concret de “pays”

C’est ce sens-là que nous avons quand nous parlons de tel ou tel qui a vécu dans notre province : « C’est un pays ». « C’est une payse ». [Personne originaire du même village, de la même région qu’une autre personne]
C’est l’expression que nous avions autrefois pour les soldats, en culottes rouges, qui se promenaient accompagnés de nourrices. C’était toujours une « payse ». [par extension, une fiancée] (…)
Je suis du même pays. Qu’est-ce que c’était que ce pays ? C’était ce qui était entouré par un cercle de forêts. Les Gaulois, pour être chez eux, brûlaient une certaine étendue autour de leur territoire. On ne cultivait pas ce cercle, et alors, il poussait d’abord des arbustes et ensuite des arbres, et cela faisait une forêt de protection. Et c’est pour cela qu’avec une certaine naïveté, vous nous dîtes que les Gaulois vivaient au milieu des forêts… (…)
Et au centre de ce cercle, il y a ce que les Romains dans la suite, ont appelé l’oppidum. L’oppidum, là où, en cas d’invasion, on pouvait se réfugier.

Extraits d’un cours de Marcel Jousse à la Sorbonne, le 4 janvier 1945

Jousse est originaire de la Sarthe, territoire où vivaient les Aulerques Cénomans, autour de l’oppidum de Cenomani (aujourd’hui Le Mans), devenu romain en l’an – 56.

Qu’est-ce que sont donc les Pagani ? Les gens du pays, les gens du Pagus. (…)
les rhéteurs nous ont appelé les Pagani, par dérision, les « païens ». Nous sommes les païens, c’est-à-dire ceux qui sont restés fidèles à l’Invisible au milieu des forêts de leur pays.

Extrait d’un cours de Marcel Jousse à la Sorbonne, le 1er mars 1945

Nouvelle publication : The Forgotten Compass

C’est un événement éditorial : The Forgotten Compass – Marcel Jousse and the Exploration of the Oral World est le premier ouvrage collectif consacré à l’actualité des recherches de Marcel Jousse dans le domaine académique des études bibliques. Il rassemble les contributions en anglais de 8 spécialistes internationaux et donne aussi la parole à Jousse lui-même à travers le texte de deux de ses cours. Les travaux de Marcel Jousse dans ce domaine sont comme une “boussole” que le livre propose de sortir de l’oubli.

Contexte

Ce livre est publié dans le cadre d’une collection spécialisée qui vise à renouveler ce champ de recherches : Biblical Performance Criticism Series. Comme Marcel Jousse en son temps, cette collection pose le constat suivant :

Les sociétés anciennes de la Bible étaient très majoritairement orales. À l’origine, les gens vivaient les traditions que l’on retrouve dans la Bible comme des performances orales. En nous concentrant sur la pratique ancienne ayant porté les traditions bibliques, nous pouvons faire passer le travail universitaire sur la Bible de la mentalité d’une culture moderne de l’imprimé à celle d’une culture orale/scribale.” [c’est-à-dire où l’écriture est le propre des scribes]

Il fait suite à la publication dans cette collection, en 2018, de Memory, Memorization, and Memorizers: The Galilean Oral-Style Tradition and Its Traditionists, un ensemble de textes de Jousse édité et traduit en anglais par Edgard Sienaert, avec une préface de Werner Kelber. Ce volume sera publié en 2023 dans sa version française par les éditions du Cerf (suite à leur rachat de Beauchesne).

Co-dirigé par Werner Kelber, Professeur émérite d’études bibliques à Rice University (Texas, USA) et Bruce Chilton, Professeur de philosophie et religion au Bard College (Etat de New York, USA), The Forgotten Compass est l’aboutissement d’un travail de plusieurs années. Une étape marquante avait été le séminaire sur Marcel Jousse and Oral Theory ayant eu lieu le 26 novembre 2019 lors du congrès annuel de la Society of Biblical Literature à San Diego. Organisé par Werner Kelber, la grande qualité de ce séminaire a fait l’unanimité parmi les participants. Si bien que la décision a été prise de transformer l’essai par un ouvrage collectif. 3 ans plus tard, voilà qui est fait !

Résumé

Voici une traduction du résumé de l’ouvrage, publié sur le site de l’éditeur :

Alors que l’exégèse historico-critique (critique de la forme) se développait, l’anthropologue français Marcel Jousse a élaboré un paradigme herméneutique, d’une portée globale et d’une vision prémonitoire, mais opposé au paradigme philologique des études bibliques. Alors que la méthodologie philologique est venue définir l’herméneutique biblique de la modernité, le paradigme de Jousse, dynamisé par le rythme, a été marginalisé et largement oublié. Bien que Jousse ait laissé relativement peu de traces écrites, plusieurs de ses plus de mille conférences, prononcées dans quatre institutions académiques différentes à Paris entre 1931 et 1957, ont été éditées et traduites en anglais par Edgard Sienaert. The Forgotten Compass examine les vues de Jousse sur la tradition et les recherches bibliques, et documente la pertinence de son paradigme pour les études bibliques actuelles. Ce qui distingue le paradigme de Jousse, c’est qu’il est fermement établi dans l’orbite des communications anciennes et profondément enraciné dans la tradition juive. The Forgotten Compass met le lecteur au défi d’apprécier le manque d’une expression appropriée, par la Bible imprimée, des sensibilités mêmes que privilégie le paradigme de Jousse, et de prendre conscience de la culture multivocale et multisensorielle dans laquelle les traditions bibliques ont émergé et dont elles se sont nourries au départ.

Contenu

1. L’œuvre de Marcel Jousse dans son contexte | Werner H. Kelber
2. Le mimisme et les récitatifs bibliques anciens | Marcel Jousse
3. L’anthropologie du mimisme, de la mémoire, et de l’invisible | Edgard Sienaert
4. Un point de vue oral sur les Proverbes 31:10-31 | Mark Timothy Lloyd Holt
5. A quoi sert Jousse ? La forme orale comme moyen mnémotechnique dans les Hodayot | Shem Miller
6. Le son, la mémoire et le style oral | Margaret E. Lee
7. Jousse, composition orale et évangile de Marc | Joanna Dewey
8. Origine et techniques des récitations bibliques | Marcel Jousse
9. L’Au/Oralité de l’Evangile araméen | Bruce Chilton
10. Marcel Jousse, le problème synoptique, le passé et l’avenir des études évangéliques | Matthew D. C. Larsen
11. Conclusion : Implications de l’œuvre de Marcel Jousse | Werner H. Kelber

Épilogue

Afin de donner au public un aperçu des enjeux importants abordés dans le livre et des perspectives qu’il ouvre, Werner Kelber nous a autorisé à partager les pages qui closent l’ouvrage et nous en avons réalisé une traduction en français.

Télécharger l’épilogue en anglais   |   Télécharger la traduction de l’épilogue

Quelques appréciations au sujet du livre :

Ces commentaires sont des traductions de ceux publiés par l’éditeur.

“Vivez l’excitation de la découverte – d’un auteur dont l’œuvre pourrait bien changer votre façon de voir la Bible. Ce livre laisse Marcel Jousse parler lui-même, mais il nous donne aussi le privilège d’accompagner de grands spécialistes qui sortent de leur routine pour s’engager avec Jousse de manière critique et enthousiaste. Sans surprise, Jousse a enseigné à Paris. De façon peut-être plus surprenante, il était un prêtre jésuite.”

Bernhard Lang, Université de Paderborn

 

“Cette excellente introduction aux travaux pionniers et novateurs de l’ethnographe français Marcel Jousse sur l’oralité et la mémoire dans le milieu juif palestinien de Jésus permet aux lecteurs de (re)découvrir ses contributions à l’étude du Nouveau Testament et à l’histoire intellectuelle moderne. Combinant deux des conférences de Jousse avec une introduction et des évaluations critiques, le livre met en évidence ses idées avant-gardistes et leur pertinence pour les recherches contemporaines.”

Catherine Hezser, SOAS Université de Londres

 

“Quel bonheur que ce volume pour quiconque s’intéresse à l’oralité ! Bien que centré sur les études bibliques, il intéressera également les spécialistes de la communication ou de l’écologie des médias en présentant les travaux de l’anthropologue Marcel Jousse aux nouvelles générations. Voir et entendre Jousse dans le contexte de son travail le rend vivant et ouvre de nouvelles voies de réflexion sur la façon dont les gens interagissent avec leurs environnements de communication.”

Paul A. Soukup, SJ, Université de Santa Clara

 

“The Forgotten Compass montre la voie vers un paradigme mieux adapté au monde targumique araméen de Rabbi Jeshua de Nazareth. Anthropologue mondial et contemporain de Rudolf Bultmann, Jousse propose une approche robuste et complète des Écritures, à la fois très ancienne et très nouvelle. Jousse est un véritable trésor pour les jeunes chercheurs qui recherchent d’autres chemins menant à la découverte.”

Randolph F. Lumpp, Regis University, chercheur émérite

 

“Jousse a utilisé une idée de l’astronome Laplace : les grandes découvertes se produisent lorsque des concepts auparavant éloignés se rencontrent enfin. The Forgotten Compass est l’un de ces événements rares. Ce magnifique recueil constitue de véritables retrouvailles, où les études évangéliques se retrouvent face à face avec l’investigation des traditions de style oral. Les gestes intellectuels venant de part et d’autre créeront un courant capable d’irriguer le champ unifié des études bibliques et des traditions orales.”

Gabriel Bourdin, Institut de recherches anthropologiques, UNAM, Mexique

 

“Marcel Jousse était bien connu pour son étude novatrice de la tradition orale et de la mémoire. Afin de célébrer cette œuvre et d’approfondir sa signification et sa pertinence pour les études bibliques et la recherche sur Jésus, Werner Kelber et Bruce Chilton, directeurs de la publication, ont réuni une impressionnante liste de chercheurs qui évaluent la pensée de Jousse. Riches en réflexion, ces essais font progresser de manière positive l’étude de l’oralité.”

Craig A. Evans, Université baptiste de Houston

Publication en italien de “L’anthropologie du geste”

Nous avons le plaisir de vous annoncer la nouvelle de la publication, en août 2022, de L’antropologia del gesto par Mimesis Edizioni, sous la direction d’Antonello Colimberti.

Cette maison fait partie du même groupe que les Éditions Mimesis en France et que d’autres sociétés publiant en italien, en anglais et en allemand. Leurs ouvrages concernent tous les champs des sciences humaines et sociales, des arts, de l’architecture, des essais politiques…

Cette traduction porte sur le premier tome de l’œuvre posthume de Marcel Jousse, intitulé L’anthropologie du geste, qui a été publié initialement en français en 1969 aux Editions Resma, avant sa reprise par les éditions Gallimard en 1974. La réédition en poche faite par Gallimard en 2008 a regroupé sous ce même titre les 3 tomes initiaux. La traduction en italien des 2 autres tomes en vue de leur publication est également en cours. La collaboratrice de Jousse, Gabrielle Baron, y a rassemblé le début d’une synthèse écrite composée par Jousse à la fin de sa vie, ainsi que d’autres courts textes publiés de son vivant, qu’il désignait par le terme de “mémoires”.

Comme le sait d’expérience Edgard Sienaert, qui a publié une traduction anglaise des mêmes textes, et a partagé quelques réflexions à ce sujet (revue Nunc, 2011), il s’agit d’une entreprise délicate. Ces textes sortent des canons établis dans notre culture d’une œuvre intellectuelle. Chez Jousse, le passage à l’écrit est en effet une étape seconde, de cristallisation en formules algébriques, d’un enseignement vivant, dans lequel il se donne tout entier, dans l’interaction avec son auditoire. Il y a donc 2 Jousse : dans ses textes et dans ses cours. Nous avons dans les premiers l’avantage de la concision, ce qui peut être un obstacle à son intelligibilité ; tandis que nous avons dans les seconds (via leur transcription disponible sous format numérique) l’avantage d’une improvisation orale maîtrisée et richement illustrée, ce qui représente un corpus considérable à parcourir si l’on souhaite en avoir une vision d’ensemble (comme l’a fait Titus Jacquignon ces dernières années pour sa thèse de doctorat, ou encore Edgard Sienaert il y a quelques années avec un recueil d’extraits de cours).

En fin de compte, le défi pour le lecteur est d’admettre, comme une conséquence de l’anthropologie du mimisme, que la pensée de Jousse n’existe plus à proprement parler depuis sa disparition ! Il nous a passé le relais, à l’aide des miroirs subjectifs que forment ses phrases (orales ou écrites), du labeur de réfléchir en nous, individuellement et par la collaboration entre nous, notre condition humaine : « le volume primordial, inépuisable, il est en vous, dans la prise de conscience de votre être profond. » (cours à l’École d’anthropologie, 12/11/1951). Connaître cette condition humaine, indissociablement universelle dans ses potentiels, et singulière dans sa réalisation par chaque peuple et chaque personne, est un projet qui peut être animé par une grande diversité d’objectifs. Toutes ces trajectoires ont un seul point de départ : l’ensemble de ce que votre vécu vous a permis d’ “enregistrer” inconsciemment.

C’est pourquoi Jousse parle autant de lui : il prend la responsabilité d’un point de vue radicalement en 1ère personne. Si l’on comprend cette posture, alors on peut lire ses paroles comme une double invitation :

  • Une invitation à faire un effort de “sympathie intellectuelle” pour tenter de percevoir le monde tel qu’il l’a perçu, à travers les combats qui étaient les siens, à son époque. Une sympathie qui ne peut pas viser une fusion, mais au mieux une résonance (selon Natalie Depraz) ;
  • Une invitation aussi à se détacher des mots de Jousse pour tourner notre attention vers le réel, d’une façon nouvelle, et si possible en allant au-delà ce qu’il a pu en dire.

Thomas Marshall

Voici quelques lignes proposées par l’éditeur pour introduire aux enjeux de ce livre (traduction de l’italien) :

La figure de Marcel Jousse apparaît dans notre siècle comme celle d’un véritable Maître occulte, dont l’influence est restée souterraine, mais donc plus profonde et plus efficace. Jousse constitue à juste titre le précurseur de ce tournant dans les formes de représentation des sciences humaines, anthropologiques surtout, qui représente la réalisation la plus critique et la plus créative de notre temps. Ce tournant est une remise en cause radicale du modèle traditionnel d’écriture monologique et autoritaire, centré sur la notion d’ “auteur” et sur une représentation frontale, plate, uniforme, euclidienne, au profit de modèles polyphoniques et multi-perspectifs. Le conflit actuel, à l’intérieur et à l’extérieur des institutions culturelles, se joue sur ces choix profonds, voire politiques, où se mesurent et s’affrontent différentes manières de comprendre la “scientificité”. Le regain d’intérêt pour l’œuvre de Marcel Jousse, après l’attaque et la défaite historique momentanée qu’elle a subie de la part des institutions académiques de l’époque, est lié précisément à ce thème sous-jacent : l’inclusion de l’expérimentation non seulement comme objet mais comme méthode et contenu des sciences humaines.

Voici une traduction en français par Régine Marie Porcher de quelques articles qui ont été publiés pour rendre compte du livre :

Article dans Lo Spettacoliere, 15/08/2022

Article dans L’Avvenire, 26/08/2022

Article dans La Difesa del Popolo, 20/09/2022

Article dans la revue Doppiozero, 11/11/2022

 

Pour en savoir plus, sur le site de l’éditeur

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